l'Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT) a donné une conférence de
presse dans ses locaux à Genève, le Lundi 19-02-2001 à 17h00
annonçant les mesures d’arrestation prises le 14 février par les autorités
suisses à l’encontre de Abdallah Kallel, ancien ministre tunisien de l’Intérieur
pour crime de tortures.
A cette occasion, message du Dr. Moncef MARZOUKI, figure de la résistance
tunisienne :
Le
Christ a dit : « Celui qui par l’épée, mourra par l’épée ». Et cette règle qui
est valable depuis l’aube des temps, pourrait s’énoncer aujourd’hui : celui qui
vivra de la peur, vivra aussi dans la peur. Aujourd’hui cette peur est en train
de vaciller du côté de la police et des tortionnaires de par le monde. Le mot
d’ordre aujourd’hui est : l’impunité a vécu ; la sanction est en route. Aussi,
je m’adresse à toute la police qui gouverne ce pays pour lui dire : il est temps
d’arrêter les exactions. Il est temps d’arrêter les dérapages. Il est temps de
se rendre compte que l’impunité, c’est terminé. Il est temps d’ouvrir une
nouvelle page, une nouvelle politique dans les rapports avec votre peuple. Il
est temps de comprendre que les droits humains sont inaliénables. La répression,
ça suffit !
Je
crois que plus que jamais nous devons être unis pour lutter contre cette
abjection qui s’appelle la torture. Pour qu’elle disparaisse de la face du monde
et de la face de la Tunisie en particulier. Mais, je voudrais dire surtout que
la torture ce n’est plus seulement cette brutalité physique immédiate et aiguë,
mais c’est aussi et surtout quelque chose de plus subtile… Ce sont des familles
entières, les familles des prisonniers politiques qui vivent une torture morale.
Aujourd’hui, c’est toute la société civile qui vit une torture morale
permanente. »
Aujourd’hui, ce sont des individus, des personnes qui sont interdits de travail,
de téléphone, de solidarité familiale… Ce sont eux qui vivent une torture morale
qui ne dit pas son nom, et c’est cette torture là qu’il s’agit aujourd’hui de
dénoncer plus que jamais. Et je dis encore une fois à ce régime : ça suffit !
Changez votre fusil d’épaule, réconciliez-vous avec la société civile. Parce que
la politique que vous avez mené jusqu’ici ne mène nulle part. Elle ne mène qu’à
ces procès qui sont tout simplement retardés.
Face
aux tortionnaires, il y a trois justices :
- la
justice internationale ;
- la
justice nationale de l’Etat démocratique de demain ;
- la
justice de Dieu.
La
probabilité d’échapper aux trois ou à l’une des justices est nulle.
J’appelle de mes vœux à la constitution d’une commission d’enquête
internationale indépendante qui devra enquêter sur la torture pratiquée en
Tunisie. Elle devra être composée de personnalités éminentes internationales.
Dr Moncef Marzouki
Sousse, le 18/02/01